Roundup et dépolitisation
RÉSUMÉ – On commence par s’étonner de l’hystérie qui s’est emparée des médias français et des milieux censément « écologistes » après la condamnation de Monsanto par un tribunal californien dans le contexte d’un cancer imputé par la victime à l’usage du Roundup, aux motifs que : i) cette condamnation n’est pas définitive, ii) elle s’inscrit dans une logique judiciaire qui n’a rien à voir avec la nôtre, iii) aux USA pas plus qu’en France, l’administration judiciaire ne peut être tenue pour une référence de vérité scientifique. On s’étonne d’autant plus que, depuis plus de dix ans, il existe en France une décision judiciaire parfaitement définitive qui tient pour acquis le lien de causalité entre une pathologie neurologique fatale et une longue exposition aux phytosanitaires. On s’interroge sur le dédain obstiné des médias et des écologistes pour cette décision pourtant fondamentale et l’on essaie d’en identifier les motifs.
TABLE DES MATIERES
- Introduction - Une histoire américaine exagérément médiatisée
- Une histoire française obstinément occultée
- Pourquoi une telle indifférence ?
- Conclusion
Introduction - Une histoire américaine exagérément médiatisée
Au mois d’octobre 2018, un tribunal californien a condamné la firme Monsanto à dédommager un certain Dewayne Johnson, jardinier atteint d’un cancer de la peau (mycosis fongoïde), au motif que l’herbicide Roundup aurait provoqué cette maladie.
Cette condamnation qui, si j’ai bien compris, peut encore être frappée d’appel, a fait l’objet, en France, d’une médiatisation hystérique alimentée par ce qu’il faut bien appeler la mouvance « écologique » [1]. Je n’ai pas les éléments d’espèce permettant de se faire un jugement motivé sur la causalité, mais je n’en ai nul besoin, puisque l’objet du présent article est de réfléchir à la médiatisation franco-française de cette affaire américaine.
La superficialité des journalistes (« jugement historique » selon Libération), des militants et, plus grave encore, du personnel politique (« une nouvelle victoire de la vérité pour les victimes du Roundup et du glyphosate » selon Michèle Rivasi) se reconstitue facilement des éléments suivants.
- Aux USA comme en France, il y a toujours des procédures d’appel dans une affaire judiciaire. Dans l’affaire Johnson, on n’en est qu’au premier degré de juridiction : ce ne serait pas la première fois qu’un résultat médiatisé comme spectaculaire se verrait rétrogradé à pas grand-chose après un appel ou une cassation [2].
- Il n’est pas besoin d’avoir fait des longues études de droit comparé pour savoir que celui qui prévaut outre-Atlantique n’a que peu à voir avec le nôtre : pas les mêmes textes, pas les mêmes procédures, pas la même jurisprudence. S’il s’agit de s’enthousiasmer pour une décision de justice concernant les USA, pourquoi ne pas militer pour une transposition en France d’autres pratiques judiciaires qui prévalent là-bas : retour à la peine de mort (si possible à grande échelle), incarcérations de masse, criminalisation des pauvres et des minorités ethniques, honoraires de résultat exorbitants pour les avocats, etc. ? [3].
- Plus ennuyeux encore : dans la mesure où, sous-tendu par une phraséologie catégorique et d’allure « scientifique », le boniment des militants concerne la démonstration d’une toxicité [4], il faudrait nécessairement en conclure que ce serait dans les prétoires (qu’ils soient américains ou français) que « la Science » se dirait préférentiellement. Outre que l’on entend suffisamment les juristes seriner à longueur de temps que la causalité « juridique » ne serait pas la même que la causalité « scientifique » [5], où irions-nous si les évaluations consacrées par les juges s’imposaient aux scientifiques [6] ? Dans une telle inversion des valeurs, il faudrait donc tenir pour acquis (accessoirement enseigner aux élèves et aux étudiants), qu’il n’y a eu aucun problème ni avec le sang contaminé, ni avec l’hormone de croissance, ni avec le nuage de Tchernobyl ? Il faudrait tenir pour acquis que ceux qui ont collecté les preuves d’un scandale d’État avec la vaccination contre l’hépatite B sont juste des rigolos. Il faudrait donner acte à Dominique Strauss-Kahn de son intransigeante vertu au motif que les actions judiciaires dirigées contre lui n’ont jamais débouché sur la moindre condamnation… Bref et surtout si on se prévaut d’une compétence scientifique et enseignante, il faut avoir une cervelle de moineau tombé dans une embuscade de lotobomiseurs pour soutenir que la jurisprudence devrait clarifier les controverses technico-scientifiques.
Pour revenir à l’affaire Johnson et pour autant que mon information soit correcte, il semble que la causalité ait été posée par un seul médecin, sans la moindre considération pour l’ampleur de la controverse scientifique internationale autour des phytosanitaires [7].
Tout cela, on en conviendra, ne tient pas debout. On peut – on doit – s’interroger sur la maturité psychologique et la crédibilité intellectuelle de gens dont l’obsession la plus manifeste est de trouver une autorité qui leur donne raison, leur permettant du même coup de proclamer « la victoire de la vérité » sans effort significatif de démonstration [8].
Une histoire française obstinément occultée
En tout état de cause, on l’a dit, ce jugement américain est parfaitement susceptible d’être annulé en appel : on peut donc s’interroger sur l’excitation française autour d’une affaire à tout le moins incertaine, alors que depuis pas moins de 12 ans, on dispose en France d’une décision judiciaire parfaitement définitive, reconnaissant la toxicité neurologique d’une exposition prolongée aux phytosanitaires, chez un agriculteur ayant finalement développé une sclérose latérale amyotrophique [9] qui s’était rapidement révélée mortelle.
Certes, il ne s’agissait que d’un litige relevant des affaires de sécurité sociale et reconnaissant la pathologie en question comme maladie professionnelle ; mais on était bien dans une affaires centrée sur l’évaluation technico-scientifique d’une causalité toxique – et même si l’enjeu financier était sans commune mesure avec l’affaire américaine, on imagine sans peine la portée de cet arrêt s’il venait à inspirer la jurisprudence des accidents toxiques chez les nombreux travailleurs exposés à des herbicides ou à des pesticides. Ce fut bien d’ailleurs comme une décision d’une indubitable portée sanitaire que cet arrêt fut d’abord accueilli dans les milieux impliqués où j’avais cru bon de le faire connaître (cf. plus bas).
Scientifiquement intéressant, cet arrêt l’était aussi d’un point de vue juridique puisque :
- avant qu’il ne soit promulgué, la Cour d’appel de Versailles avait refusé ma réinscription comme expert judiciaire [10] : c’est donc comme expert purement privé que j’étais intervenu dans cette affaire, et il n’est pas besoin d’une grande familiarité avec la justice pour savoir que par principe, les magistrats sont généralement fort indifférents, voire hostiles aux expertises privées [11] ;
- n’ayant pas l’habitude de me prévaloir de compétences qui ne sont pas les miennes, je n’avais pas caché que je n’étais pas toxicologue, et encore moins spécialiste des phytosanitaires, alors que la partie adverse (la Sécurité Sociale Agricole [MSA]) se référait sans la moindre vergogne à des « experts » judiciaires pour nier la causalité ;
- nonobstant cette incompétence assumée, la Cour d’appel s’autorisait de mon « rapport méticuleux et détaillé (…) témoignant d’un souci rigoureux d’objectivité », pour l’opposer aux avis des précédents médecins qui avaient fondé leurs dénégations sur « des études négatives de crédibilité douteuse, sans même les référencer » : on méditera utilement sur le contraste entre ce souci voyant de motiver la conviction de la Cour sur un sujet dont je n’ai pourtant pas caché qu’il n’était pas au cœur de mes compétences, et le dédain expéditif du Pôle santé pour mon incompétence de « simple généraliste » sur des affaires où j’avais toute une vie professionnelle (et un chiffre d’affaires) pour attester ma pratique du médicament [12].
En tout état de cause et toujours dans le souci de permettre au profane de se faire sa propre idée, on trouvera en PJ une copie anonymisée de mon rapport : j’ai la prétention que, comme d’ailleurs attesté par la Cour, ce rapport fait largement le poids comparativement à d’autres contributions d’intervenants a priori plus spécialisés que moi (une fois rappelé, bien entendu, que ma mission n’était pas d’incriminer tel ou tel produit particulier [auquel cas je l’aurais probablement refusée pour les raisons susdites], mais d’examiner s’il était raisonnable de penser, sur la base des données disponibles, qu’une exposition massive et durable à des phytosanitaires pouvait avoir des conséquences neurologiques dommageables).
Au moment où j’avais été informé de cet arrêt pris par la Cour d’appel, on était dans le contexte de ce qu’on a appelé « Le Grenelle de l’environnement », fin 2007. Or, bien que je travaille essentiellement seul et que je n’y cherche aucune publicité personnelle, c’est un autre trait de mon engagement intellectuel que, dès que je suis confronté à une problématique qui paraît relever du Bien Public, je fais le maximum pour en assurer la médiatisation [13]. En l’espèce, je pris donc contact avec les journalistes en pointe sur ce débat, lesquels, comme attendu, témoignèrent de leur intérêt pour cette décision de justice effectivement exceptionnelle. Nonobstant cet accueil favorable, le contact s’arrêta là et je ne reçus aucune des relances promises.
Même jeu quand, dix ans après [14] et un peu par hasard, je tombai au cours de mes lectures sur une équipe universitaire travaillant sur la jurisprudence des affaires liées aux pesticides et sur la dynamique des mouvements visant à la « reconnaissance » des victimes (air connu). Avec la même abnégation, je pris contact avec l’un des responsables qui, lui aussi, témoigna d’un vif intérêt avant de sombrer - lui aussi - dans un mutisme antagoniste avec son accueil initialement ouvert.
Pourquoi une telle indifférence ?
Un point commun de ces deux médiatisations ratées, c’est qu’aucun de mes interlocuteurs n’a jamais reçu le moindre élément de mon expertise : il est donc impossible d’imaginer que c’est sur la base documentée de ma contribution (cf. PJ) que le contact se serait rompu, au motif d’une éventuelle insuffisance technico-scientifique. Par conséquent, je ne vois d’autre explication que la suivante : s’étant spontanément tournés vers le présent site après notre première conversation, ils n’en ont pas du tout apprécié le contenu.
Or, qu’est-ce qui a pu les révulser ? Je n’envisage rien d’autre que le point de vue résolument politisé des contributions qu’il abrite, dont on voit bien qu’il est radicalement antagoniste avec celui de la mouvance écologique (du moins celle dont on parle), notamment pour ce qui concerne :
- le choix d’alliances, une fois posé que les ennemis de mes ennemis ne sont pas mes amis, et qu’il s’en faut de beaucoup pour que soit considéré comme tel un type (comme Jadot) qui dénonce mécaniquement « les lobbies » tout en relayant bêtement la propagande de ces mêmes lobbies [15]
- la dénonciation sélective, sachant que les coupables, ce ne sont pas toujours les autres et rien qu’eux : dans le cas de mon patient, ce dernier reconnaissait sans difficulté qu’il avait usé et abusé des phytosanitaires en négligeant systématiquement les précautions édictées par les fabricants concernés (doses, protections…) [16].
Conclusion
« La politique implique des choix » disais-je dans un précédent article en citant Castoriadis, alors que sous le prétexte de la nécessaire expertise, tout est fait pour décourager les citoyens d’imposer leur droit au choix : comment pourraient-ils choisir alors qu’on leur dénie la capacité de comprendre l’essentiel ? Fondé sur une contribution a priori éloignée de mon expertise la plus documentable puisque concernant les phytosanitaires et non des médicaments, le présent article vise néanmoins à montrer que quand on s’est entraîné à maîtriser un certain savoir, il est néanmoins possible de se poser en acteur responsable relativement à des savoirs différents, mais relevant de méthodes proches (en l’occurrence, l’analyse bibliographique des données disponibles). Tout ça, évidemment, sous réserve de rester ouvert à la critique de ceux qui sont supposés savoir mieux : mais comme je l’ai montré ici, ceux que j’ai sollicités au motif qu’ils étaient censés savoir mieux que moi se sont débinés – demandez-vous pourquoi [17].
La médiatisation exaltée de la condamnation qui a récemment frappé Monsanto illustre mon propos. Qu’il suffise, après avoir caractérisé la « niaiserie » de Jadot sur les vaccins, de regarder les gesticulations d’un autre « Vert », N. Hulot : alors qu’avec le statut pourtant considérable de ministre d’État, il n’a strictement rien fait de significatif ni sur les phytosanitaires, ni sur rien d’autre, il attend d’être redevenu citoyen ordinaire pour instrumentaliser une décision provisoire et locale d’un tribunal américain à laquelle il ne peut strictement rien… « Discours vide » une fois encore, pour continuer de citer Castoriadis.
Car qu’y avait-il dans cette décision américaine pour exciter les foules françaises ? Un manichéisme toujours fondé sur le même triptyque : une victime forcément innocente (un pauvre jardinier qui avait toujours appliqué obsessionnellement les précautions d’emploi édictées par les fabricants ou la réglementation), un méchant (Monsanto) et des vaillants chevaliers (des avocats intéressés exclusivement par la victoire du Droit et le triomphe du Juste).
Un triptyque difficile à trouver sur un site comme le mien qui exhorte tout un chacun à balayer devant sa propre porte avant d’aller chercher la faute des autres… [18]
[1] Vous savez : ces gens qui pourfendent les « lobbies » en promouvant n’importe quelle vaccination ou encore ceux qui défendent l’environnement en collectionnant un nombre impressionnant de véhicules à moteur grâce à la fortune acquise au moyen d’une prédation touristique régulière, financée par ces mêmes lobbies…
[2] Les agents de la médiatisation initiale éprouvent rarement le besoin de faire amende honorable quand ils ont exagéré la portée d’une première décision.
[3] Dans les affaires de santé, il n’est est plus rare de rencontrer des plaignants qui, sur la base des séries américaines ou du discours insensé de leur avocat, ont des attentes clairement irréalistes sur le montant potentiel de leur dédommagement.
[4] Rivasi célèbre une victoire de la « vérité », selon une épistémologie un peu expéditive pour quelqu’un qui aime à se poser en scientifique et en femme politique.
[5] L’argument n’est pas irrecevable en soi. Mais, dans les affaires de santé publique où le pot de fer est rarement du côté de ceux qui ont été maltraités, il est surtout invoqué par les magistrats pour justifier leur pusillanimité devant la sanction de faits difficiles à contester.
[6] Il faut avoir l’expérience de l’inculture technico-scientifique phénoménale des juges français (on rappelle que l’affaire de l’hormone de croissance a montré que les juges spécialisés du Pôle santé ne savaient pas ce qu’est une autorisation de mise sur le marché)…
[7] Comme je l’ai déjà signalé, je n’ai pas les éléments suffisants pour trancher dans l’affaire Johnson ; mais dans les affaires françaises, notamment celle de l’hormone de croissance, j’ai pu constater l’impact exorbitant de l’opinion d’un seul médecin, sans compétence connue sur le Creutzfeldt-Jacob, seul à affirmer péremptoirement une causalité iatrogène qui avait été démentie par les plus éminents spécialistes de la maladie.
[8] La démonstration incluant, notamment, une évaluation comparative rigoureuse des thèses qui s’affrontent : une hiérarchisation des sources qui transcende l’épistémologie ridicule des manuels à la solde utilisés par les enseignants des SVT.
[9] La sclérose latérale amyotrophique est une dégénérescence des neurones moteurs, qui se traduit par une paralysie progressive des muscles respiratoires, d’évolution fatale.
[10] Comme indiqué dans la PJ, j’étais encore inscrit quand j’ai été contacté par la victime. Mais même à ce moment, il s’agissait d’une mission strictement privée (càd qu’elle n’avait pas été ordonnée par un tribunal.
[11] Faute de quoi, chaque partie ferait intervenir à son gré tel ou tel présumé « expert » privé (par exemple : un ancien mannequin…), alors que la justice française se caractérise justement par sa prétention à entretenir en interne un corps d’experts judiciaires, qui lui fournissent une référence patentée.
[12] Au titre des « critères intrinsèques de crédibilité » destinés à permettre au profane de se faire son idée dans une controverse spécialisée, on notera qu’avant de s’acharner sur moi, le Pôle santé m’avait rémunéré pour plusieurs milliers d’heures de travail, ce qui fait quand même cher pour une incompétence aussi caractérisée…
[13] Ce qui, soit dit en passant, avait été porté à mon discrédit par le premier Président de la Cour d’appel de Versailles qui (oubliant la chronologie des causes avec une mauvaise foi typique de haut magistrat) justifiait son refus de me réinscrire sur les listes d’experts en écrivant : « Dans chaque cas, le Dr Girard n’entend pas s’en rapporter à la justice ; il intervient systématiquement et de manière particulièrement virulente, même lorsqu’il n’est pas partie au procès (…) ». C’est, mine de rien, tout un programme de travail que d’intervenir « systématiquement » dans « chaque cas »…
[14] Donc assez récemment au moment où s’écrivent ces lignes.
[15] naturellement centrées sur les propagandistes de la médicalisation, mes considérations sur le décervelage des militants s’élargiraient sans peine, en cette nouvelle espèce, aux acteurs les plus vicieux (tels que la FNSEA) d’une agriculture atrocement industrialisée.
[16] C’est un classique de la médecine du travail qu’il ne suffit pas d’édicter des normes ou des précautions : encore faut-il agir pour que les travailleurs se les approprient et qu’ils les mettent effectivement en pratique. En l’espèce, la veuve de mon patient décédé reconnaissait sans fard que les employés qu’elle avait dû recruter pour reprendre l’exploitation étaient exposés exactement aux mêmes produits que ceux qui avaient emporté son mari.
[17] Au moment même où j’achève le présent article, une lectrice compétente en matière d’environnement agricole me dit avoir récemment entendu l’un des "éminents" journalistes qui m’ont fait faux bond, et s’être trouvée consternée par le manichéisme grossier du type.
[18] N.B. Merci de faire remonter aux viragos du REVAHB que, comme illustré par le présent article, j’ai bien d’autres sujets de préoccupation que la vaccination contre l’hépatite B et que si je me permets de les critiquer, ce n’est pas parce que cette vaccination serait « mon truc » que je chercherais juste à m’approprier : c’est parce qu’elles sont abominablement perverses et atrocement stupides.
Marc Girard
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